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Les vagues

Deux jours auparavant, Rilviero avait eu avec Traumfreund une conversation là-dessus, qu’il avait jugée importante sans bien savoir pourquoi. Il avait commencé à lire les revues et avait fait part au docteur de ses sentiments face à ce savoir qui l’excluait, dont la langue épineuse ne lui laissait pas la moindre chance. À ce constat banal s’ajoutait une déception plus profonde : au fil des pages, l’im­pression l’avait gagné que pour lui dont ce n’était pas le métier, même apprendre avec zèle, même arracher de haute lutte une maî­trise technique du sujet ne servirait à rien. De toute façon, on le trompait sur la marchandise. Ça lui faisait une belle jambe, que le sommeil paradoxal soit contrôlé par des mécanismes cholinergiques du tronc cérébral…

 

Traumfreund avait froncé les sourcils, pas surpris pour un sou, mais sincèrement découragé: «Je sais bien… vous êtes comme tout le monde… Vos attentes par rapport à la science n’ont rien de scien­tifique. Vous aimeriez que ce soit une sorte de magie moderne… et que cela tienne aussi de la religion, tant qu’on y est : une parole révélée, accessible à toutes les oreilles, qui provoque les miracles et lève d’un coup les voiles. » Et rilviero n’était pas le seul dans ce cas, bien sûr : venus en nombre, les gens battaient des mains et voulaient le grand Pourquoi. Mais la science n’avait à leur offrir que de petits comment et des pourquoi partiels, imbriqués les uns dans les autres, et aussi indifférents en eux-mêmes que pouvaient l’être les rouages d’une machine. Les gens regardaient ce cadeau déposé dans leur paume avec une frustration intense ; ils ne remer­ciaient même pas.

 

« Mais jamais ! soupira Traumfreund, jamais la science ne leur donnera ce qu’ils veulent. Et elle ne peut pas non plus nous dire comment vivre. Si : mangez moins gras, faites du sport. Bon. Ça ne va pas chercher bien loin. Je pourrais dire : la science est invivable et inconséquente. Vous avez une décision à prendre ; il en va de votre avenir ; on vous a prévenu : si vous vous plantez, remords éternels. Eh bien… vous n’allez pas vous faire implanter dans le cerveau un microprocesseur pour calculer les conséquences, les dix coups qui viennent et leurs variantes. Ce qui est bon pour me battre aux échecs n’est pas praticable dans la vie. La version scientifique du monde n’annule pas sa version ordinaire. Alors vous vous plantez devant la glace une bonne fois, vous auscultez vaguement votre poitrine, sentir comment ça cogne, et allons-y: le hasard, une impulsion font pencher la balance… — Comment est-ce que vous avez rencontré Lisa ?… Peu importe. Une femme, mettons. Cette femme. Elle vous plaît, dans la rue. Pourtant elle n’est pas vraiment belle ? Vos amis s’étonnent et vous demandent ce que vous lui trouvez. Quand bien même vous seriez un neurobiologiste accompli, vous n’allez sûrement pas commencer à vous interroger sur les phéromones qui cir­culent entre vous et sur la correspondance de vos patrimoines génétiques… Vous la regardez. Vous l’abordez, ou pas. Nous ne pouvons pas vivre selon la science : nous devons continuer à vivre selon le mystère. »

 

 

Qu’est-ce que Rilviero avait répondu ? Il cherchait à se souvenir, l’œil fixé sur les courbes blanches. Elles ne s’agitaient pas trop, les vagues. Ça faisait un sacré bout de temps désormais que c’étaient toujours les mêmes, hautes et lentes. Est-ce que c’était normal ? Ah oui, il avait dû dire : qu’il comprenait bien ça. Mais pourquoi soupirer ? La science continuait son chemin, progressait. La vie continuait son chemin, sans vraiment progresser. Qu’est-ce qui perturbait Traumfreund là-dedans ? Si, si, c’était grave. Traum­freund cherchait les mots pour le montrer. Il y a donc cette salle… où on a réuni l’humanité pour lui fournir quelques explications sur le monde qui l’entoure. C’est un public plutôt boudeur, qui menace à tout va de déserter les rangs. Les voiles ne se sont pas levés. Mais l’autre numéro, celui des miracles, a bien plus de succès. Un succès, même, qui ne se dément pas au fil des siècles: collez votre oreille là, vous entendrez votre fille qui est à Singapour ; montez là-dedans, ça va voler ; cliquez ici, vous aurez la réponse en 0,7 seconde. On ne comprend pas, mais force est de constater que cela change la vie. « Moi j’ai eu une formation scientifique, avançait Traumfreund, je m’en sors… à peu près. Mais vous, par exemple, ça ne vous dérange pas ? Je veux dire, de vivre dans un monde dont vous ne comprenez rien ? Pas même les mécanismes de base ? »

 

Rilviero dut se confesser et ne put le faire que dans le style des récits de voyage : d’accord, il maniait chaque heure de chaque jour des machines merveilleuses, déambulait sur une terre aux beautés inouïes, qu’il savait certes ne pas être plate, mais dont il ignorait les arcanes, s’éveillait enfin dans un corps qu’il ne ressentait pas le besoin de connaître dans le détail tant qu’il fonctionnait correctement, mais qu’il se voyait obligé de confier à d’autres, presque à l’aveugle, dès qu’il se détraquait, tant l’anatomie lui en était étrangère.

 

« Il y a des gens, renchérit Traumfreund, qui ont une conscience assez aiguë de la mort pour se rappeler chaque jour qu’elle se rap­proche. Moi c’est autre chose : je sens se creuser chaque jour le fossé entre l’état des connaissances humaines et cette bouillie mal digérée qu’a dans le ventre l’homme probable. Vous savez, l’homme pris au hasard dans la foule, l’individu lambda. Beaucoup de scien­tifiques se foutent de M. Lambda. Personnellement, je ne peux pas m’empêcher de penser à lui. Il en est, en gros, et dans le meilleur des cas, resté à la Renaissance. Copernic et Galilée… ça lui va à peu près. Le reste, dans sa tête, n’est que fantasmes. La relativité, par exemple : vous dites ça à M. Lambda, et sa mémoire ouvre la boîte, le savant fou surgit, il tire la langue, et rien de plus. Je n’ose même pas parler de la physique quantique. Et du chat de Schrödinger ! Et de… » Non, effectivement, suppliait Rilviero : mieux vaut que vous n’en parliez pas. Alors oui: l’ignorance reculait, indéniablement, en valeur absolue ; mais elle ne cessait d’augmenter en termes relatifs ; et le bon M. Lambda se mettait à ressembler à ce type, dans le hall d’une gare, qui s’est mis à courir à côté du train qui s’ébranle, et perd du terrain, et se retrouve bientôt essoufflé en bout de quai, tandis que la voiture de queue disparaît à l’horizon. Le problème ? Traum­freund fronçait un peu plus les sourcils. Il prenait ça très au sérieux. Il insistait : « J’ai pas mal de problèmes dans la vie, mais celui-ci est un de ceux qui me tarabustent le plus. Parce que qui décidera où doit aller ce train ? En principe, nous devrions faire ça tous ensemble : le réseau, c’est nous. Mais nous avons couru, et nous voilà assis en bout de quai, les jambes ballantes au-dessus du ballast, en train de cracher nos poumons. Qu’est-ce qu’on peut décider dans ces conditions-là ? » Alors, à défaut de pouvoir suivre, de comprendre la logique scien­tifique, de contrôler les aiguillages, le public réclame: la science, il veut en voir la couleur ; que l’on fasse venir les miracles ! Et pas n’importe quels miracles, s’il vous plaît : des qui nous touchent, qui améliorent la vie de nous tous qui sommes l’homme.

« Ils sont pleins de bonne foi, concédait Traumfreund avec amertume. Ils viennent, ils font valoir leur satisfait ou remboursé. Et ils ont raison, en un sens : si le progrès n’est pas pour eux, qui vivent et souffrent, pour qui, alors ?… Ils ne se rendent pas compte qu’à vouloir à tout prix satisfaire, la science risque de se réduire comme une peau de chagrin et de disparaître dans le nombril de l’homme ; de n’être plus que ce geste que font les hommes pour ramener le monde dans leur nombril. Alors qu’à l’origine… ça n’avait rien à voir. Ce sont des gens qui sont sortis de chez eux, la nuit, pour regarder les étoiles. Ils n’attendaient rien. Ils avaient cette curiosité. »

 

Rilviero avait posé la main sur l’épaule du psychiatre, comme pour le réconforter – il s’en souvenait avec une netteté stupéfiante : la première fois qu’il le touchait autrement que pour lui serrer la main ; il l’avait assuré que cette curiosité ne s’était pas perdue. Il était curieux, lui. Plein de gens l’étaient encore. « Bien sûr, lui avait répondu Traumfreund. Je sais. Heureusement ! Je sais bien qu’elle n’a pas disparu. Il n’y a pas de raison. Mais simplement, avouez : sa voix est la plus faible de toutes. Et elle est vite couverte par les exigences du consommateur, les exigences de la croissance et le souffle des machines. Ça n’a probablement rien d’irréversible… mais c’est dommage, tout de même. »

 

Rilviero remuait ces pensées – rêvait de sortir regarder les étoiles – rouvrait les yeux, entendait le souffle des machines – conti­nuait à surveiller les graphes. Et, malgré toute la sécheresse des détails, malgré les révélations qui ne viennent pas, les images qui le poursuivaient cette nuit-là lui plaisaient, il sentait d’ores et déjà qu’il s’en souviendrait longtemps : dans chaque grande ville du monde développé, il y avait des salles comme celle qu’Oliveira et Berardi avaient mise en place, des casques d’électrodes et des crânes de dormeurs dedans; les dormeurs dormaient, rêvaient peut-être; les hommes dehors attendaient, immensément curieux, un peu fébriles parfois ; et les graphes, sur les écrans du Cap, de Tokyo, du Mas­sachusetts, levaient et abaissaient leurs vagues d’une rive océane à l’autre, dessinaient nuit après nuit les contours de la mer intérieure en nous, cette mare nocturnum largement inconnue.

 

© Vincent Message


Die Wellen

Zwei Tage davor hatte Rilviero mit Traumfreund eine Diskussion darüber gehabt, die er für wichtig hielt, ohne genau zu wissen, warum. Er hatte in den Zeitschriften gelesen und dem Arzt von seinem Gefühl erzählt, dass dieses Wissen ihn ausschließe und die komplizierte Sprache ihm nicht die geringste Chance lasse. Zu dieser banalen Feststellung sei noch eine tiefere Enttäuschung hinzugekommen: Je mehr er lese, desto mehr verfestige sich sein Eindruck, dass ihm selbst eifrigstes Lernen, selbst eine mühsam errungene technische Beherrschung des Gegenstandes nichts bringen würden, da er kein Arzt sei. Man habe ihm also das Falsche angedreht. Jedenfalls könne er nichts damit anfangen, dass der paradoxe Schlaf von cholinergischen Mechanismen des Hirnstamms kontrolliert werde …

Traumfreund hatte die Stirn gerunzelt, gar nicht überrascht, sondern tief entmutigt: „Ich weiß wohl … Sie sind wie alle anderen … Ihre Erwartungen an die Wissenschaft haben nichts mit der Wissenschaft zu tun. Sie möchten, dass sie eine Art moderner Magie sei … die, wenn wir schon dabei sind, auch ein bisschen Religion enthalten soll: eine Offenbarung, die jedem Ohr zugänglich ist, die Wunder wirkt und mit einem Schlag alle Geheimnisse lüftet.“ Und Rilviero sei damit natürlich nicht allein: Die Leute kämen in Scharen, klatschten und verlangten nach dem großen Warum. Die Wissenschaft könne ihnen jedoch nur kleine Wies und partielle Warums bieten, die ineinandergriffen und an sich so gleichgültig seien wie das Räderwerk einer Maschine. Die Leute wögen dieses Geschenk in ihrer Hand und seien enttäuscht; ja, sie bedankten sich nicht einmal dafür.

„Die Wissenschaft“, hatte Traumfreund geseufzt, „wird ihnen niemals geben, was sie wollen. Genauso wenig kann sie uns sagen, wie wir leben sollen. Ja, esst nicht so fett und treibt Sport. In Ordnung. Aber das hilft auch nicht viel weiter. Ich könnte sagen: Die Wissenschaft ist unlebbar und inkonsequent. Sie müssen eine Entscheidung treffen; es geht um Ihre Zukunft; Sie waren gewarnt: Wenn Sie es versieben, machen Sie sich ewig Vorwürfe. Na gut … Sie werden sich keinen Mikroprozessor implantieren lassen, um die Folgen zu berechnen, die nächsten zehn Fälle plus Varianten. Was gut ist, um mich beim Schach zu schlagen, ist im Leben nicht anwendbar. Die wissenschaftliche Version der Welt setzt die alltägliche nicht außer Kraft. Also stellen Sie sich vor den Spiegel, horchen vage ihre Brust ab, um zu spüren, wie es pocht, und los: Der Zufall gibt den Ausschlag, ein Impuls … – Wie haben Sie Lisa kennengelernt? … Nicht so wichtig. Sagen wir, eine Frau. Diese Frau auf der Straße gefällt Ihnen. Sie ist nicht sonderlich hübsch. Ihre Freunde wundern sich und fragen, was Sie an ihr finden. Selbst als ausgebildeter Neurobiologe werden Sie bestimmt keine Gedanken an die zwischen Ihnen zirkulierenden Pheromone oder die Übereinstimmung Ihres genetischen Erbes verschwenden … Sie sehen sie an. Sie sprechen sie an oder nicht. Wir können nicht nach der Wissenschaft leben – wir müssen weiter mit dem Mysterium leben.“

Was hatte Rilviero geantwortet? Er versuchte sich zu erinnern, die weißen Kurven fest im Blick. Die Wellen bewegten sich kaum. Das dauerte nun schon eine ganze Weile, dass sie sich gleich blieben, hoch und langsam. Ob das normal war? Ach ja, er hatte wohl gesagt, dass er ganz gut verstehe. Aber warum habe Traumfreund geseufzt? Die Wissenschaft gehe ihren Weg und komme voran. Das Leben gehe seinen Weg, ohne wirklich voranzukommen. Was ihn denn daran störe? Doch, doch, das sei schlimm. Traumfreund suchte nach Worten, um es zu demonstrieren. Da sei also dieser Saal … in dem man die Menschheit versammelt habe, um ihr ein paar Erklärungen über die Welt um sie herum zu liefern. Ein eher sprödes Publikum, stets bereit, die Ränge zu verlassen. Die Schleier des Geheimnisses hätten sich nicht gelüftet. Die andere Nummer dagegen, die mit den Wundern, ziehe viel besser. Und der Erfolg lasse nicht einmal über die Jahrhunderte nach: Halten Sie das an Ihr Ohr und hören Sie Ihre Tochter in Singapur; steigen Sie ein, es fliegt; drücken Sie da drauf, die Antwort erfolgt in 0,7 Sekunden. Sie verstünden es nicht, müssten aber feststellen, dass es das Leben verändere. „Ich habe eine wissenschaftliche Ausbildung, bei mir geht es … einigermaßen. Aber Sie zum Beispiel, stört Sie das nicht? Ich meine, in einer Welt zu leben, die Sie überhaupt nicht begreifen? Nicht einmal deren Grundmechanismen?“

Das musste Rilviero einräumen, konnte es allerdings nur im Stil alter Reiseberichte: Zugegeben, er bediene täglich rund um die Uhr wundersame Maschinen, er gehe durch eine Welt voll unerhörter Schönheiten, von der er zwar wisse, dass sie keine Scheibe sei, die ihm aber dennoch ein Rätsel bleibe, und er erwache jeden Morgen in einem Körper, bei dem er, so lange er gut funktioniere, nicht das Bedürfnis habe, ihn in allen Einzelheiten zu kennen, wenn aber etwas kaputt sei, sehe er sich gezwungen, ihn quasi blindlings anderen anzuvertrauen, da ihm dessen Anatomie vollkommen fremd sei.

„Es gibt Menschen“, fuhr Traumfreund fort, „die ein so geschärftes Bewusstsein des Todes haben, dass sie sich tagtäglich an sein Näherrücken erinnern. Bei mir ist das anders: Ich merke, wie sich der Graben zwischen dem Wissensstand der Menschheit und der schlecht verdauten Brühe, die der wahrscheinliche Mensch im Bauch hat, tagtäglich vertieft. Sie wissen schon, der zufällig aus der Menge gegriffene Mensch, das Lambda-Individuum. Viele Wissenschaftler pfeifen auf Herrn Lambda. Ich dagegen kann gar nicht anders als an ihn zu denken. In dieser Hinsicht ist er bestenfalls in der Renaissance stehengeblieben. Kopernikus und Galileo … das geht gerade. Sonst hat er nur Hirngespinste im Kopf. Die Relativität beispielsweise: Erwähnen Sie sie gegenüber Herrn Lambda, macht sein Gedächtnis die Büchse auf, der verrückte Professor springt heraus, zeigt die Zunge und Schluss. Von der Quantenphysik will ich gar nicht erst reden! Oder von Schrödingers Katze! Oder …“ Nein, bitte, flehte Rilviero, besser, Sie reden nicht darüber. Ja, es sei unleugbar, in absoluten Zahlen nehme das Unwissen ab; relativ betrachtet aber wachse es ständig; mittlerweile gleiche der gute Herr Lambda einem Typen, der in der Bahnhofshalle neben dem abfahrenden Zug herzulaufen beginne, zusehens an Terrain verliere und bald atemlos am Bahnsteig stehe, während der letzte Waggon hinter dem Horizont verschwinde. Was daran das Problem sei? Traumfreund runzelte ein wenig die Stirn. Er nahm das alles sehr ernst. „Ich habe genug Probleme im Leben, aber das ist eines von denen, die mich am meisten quälen”, insistierte er. “Wer entscheidet, wohin dieser Zug fahren soll? Im Prinzip müssten wir das alle gemeinsam tun − wir sind schließlich das Verkehrsnetz. Aber wir rennen alle bloß hinterher und sitzen dann mit hängender Zunge und über den Schienen schlackernden Beinen am Ende des Bahnsteigs. Wie kann man unter diesen Umständen Entscheidungen treffen?“ Das Publikum, das nicht in der Lage sei hinterherzukommen, die wissenschaftliche Logik zu begreifen, die Weichenstellungen zu kontrollieren, stelle also Forderungen: Her mit der Wissenschaft in Technicolor; her mit den Wundern! Aber bitte nicht irgendwelche, sondern nur solche, die uns berühren und unser Leben verbessern.

„Sie handeln in gutem Glauben“, gestand Traumfreund mit Bitterkeit ein. „Sie sind unzufrieden und pochen auf ihre Geld-zurück-Garantie. Und in gewissem Sinne haben sie sogar Recht: Wenn der Fortschritt nicht für die ist, die leben und leiden, für wen sonst? … Ihnen ist nicht bewusst, dass eine Wissenschaft, die es ihnen um jeden Preis recht machen will, Gefahr läuft, zu schrumpfen wie ein Chagrinleder und im Nabel des Menschen zu verschwinden; nichts weiter zu sein als die Geste, mit der der Mensch die Welt auf seinen Nabel zurückführt. Anfangs … anfangs war es ganz anders. Da gingen Leute in die Nacht hinaus, um die Sterne zu betrachten. Sie hatten keine Erwartungen. Sie waren bloß neugierig.“

Rilviero hatte dem Psychiater seine Hand auf die Schulter gelegt, wie um ihn zu trösten – daran erinnerte er sich verblüffend deutlich: Es war die erste Berührung, die kein Händedruck war; er versicherte ihm, dass diese Neugier noch nicht ausgestorben sei. Er sei nämlich neugierig. Viele seien es noch. „Natürlich“, erwiderte Traumfreund. “Glücklicherweise! Mir ist schon klar, dass die Neugier nicht ganz verschwunden ist. Dafür gibt es keinen Grund. Aber Sie müssen zugeben: Ihre Stimme ist die schwächste von allen. Und sie wird schnell übertönt von den Ansprüchen der Konsumenten, den Erfordernissen des Wachstums und dem Odem der Maschinen. Das kann sich wahrscheinlich auch wieder ändern … schade ist es trotzdem.“

Rilviero bewegte diese Gedanken hin und her – er träumte davon, hinauszugehen und die Sterne zu betrachten – schlug die Augen wieder auf, lauschte dem Odem der Maschinen – und überwachte weiter die Graphen. Trotz der spröden Details, trotz der ausbleibenden Offenbarungen gefielen ihm die Bilder, die ihm in dieser Nacht im Kopf herumgingen, und er fühlte schon jetzt, dass er sich lange daran erinnern würde: In jeder großen Stadt der entwickelten Welt gab es Räume wie jenen, den Oliveira und Berardi eingerichtet hatten, Helme mit Elektroden und Köpfe von Schläfern darin; die Schläfer schliefen, träumten vielleicht; die Menschen draußen warteten, höchst neugierig, manchmal ein bisschen nervös; und am Cap, in Tokio, in Massachusetts stiegen und sanken die Wellen auf den Bildschirmen von einem ozeanischen Ufer zum anderen und zeichneten Nacht für Nacht die Umrisse des Meeres in uns auf, des weithin unbekannten mare nocturnum.

 


© Deutsche Übersetzung: Brigitte Große

 

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